Paru le 24/08/2016 | Broché 477 pages
traduit de l'anglais (Canada) par Gérard de Chergé
Clémence Cochan (Le comptoir des lettres)
Une pandémie décime l'espèce humaine. Bientôt, il n'y a plus d'électricité, plus d'eau courante, plus de vie moderne. Les survivants se regroupent, s'organisent. Il ne reste de la civilisation qu'un souvenir.
Emily St. John Mandel imagine la catastrophe, immédiate, et sur la décennie suivante, en érigeant le destins de quelques individus, tous plus ou moins liés : comme un coup de théâtre, Arthur, comédien, s'écroule sur scène juste avant que la catastrophe ne se déclare, en proie à un arrêt cardiaque. L'homme qui a lui a donné les premiers soins, une jeune comédienne, son meilleur ami, ses ex-femmes, son fils : il sera pour certain leur dernier souvenir, ou une résonance de la vie d'avant.
"Ce qui a été perdu lors du cataclysme : presque tout, presque tous. Mais il reste encore tant de beauté : le crépuscule dans ce monde transformé, une représentation du Songe d'une nuit d'été sur un parking, dans la localité mystérieusement baptisée St. Deborah by the Water, avec le lac Michigan qui brille à cinq cents mètres de là."
Une tragédie. Arthur Leander, comédien adulé, s'effondre pendant une représentation du Roi Lear à Toronto. Mort. Le coeur foudroyé. Au même moment, une catastrophe d'une toute autre ampleur se joue. Une pandémie va en quelques semaines décimer 99% de la population mondiale. Rideau. La civilisation n'est plus. 20 ans plus tard, une troupe d'artistes, la bien nommée Symphonie itinérante continue de porter la parole shakespearienne entre les îlots de survivants. Le monde est encore rude mais l'humanité commence à apercevoir le bout du tunnel dans une nature régénérée. Une aube nouvelle est-elle sur le point de se lever ? Que reste-t-il du passé ? De "quelle étrange beauté", les objets qui n'ont plus cours sont-ils porteurs pour ceux qui ne les ont pas connu ?
Emily St. John Mandel peut s'enorgueillir d'avoir rafraîchi avec élégance le genre du roman apocalyptique."Station Eleven" est un voyage qui inaugure de nouveaux chemins que le lecteur emprunte avec reconnaissance pour aller à la rencontre des vivants, certains plus recommandables que d'autres, d'ailleurs. L'aisance avec laquelle elle nous fait naviguer du passé au présent, d'un personnage à l'autre, sur sa toile narrative est prodigieuse. Loin des Survivals bas du front mais sans pour autant faire l'impasse sur le spectacle de l'effondrement, elle semble surtout dédier son roman à ceux qui ont voué leur vie à l'Art.
Expérience de lecture inoubliable, "Station Eleven" intronise une jeune reine de l'anticipation littéraire portée jusqu'à nous par l'ondulation des hourras venus d'Amérique.
Station Eleven
Un soir d'hiver à l'Elgin Theatre de Toronto, le célèbre acteur Arthur Leander s'écroule sur scène, en pleine représentation du Roi Lear. Plus rien ne sera jamais comme avant.
Dans un monde où la civilisation s'est effondrée, une troupe itinérante d'acteurs et de musiciens parcourt la région du lac Michigan et tente de préserver l'espoir en jouant du Shakespeare et du Beethoven. Ceux qui ont connu l'ancien monde l'évoquent avec nostalgie, alors que la nouvelle génération peine à se le représenter. De l'humanité ne subsistent plus que l'art et le souvenir. Peut-être l'essentiel.
Entre l'avant et le présent, Station Eleven entrelace sur des décennies la destinée de personnages inoubliables. Élégie sur la condition humaine, ce livre à la construction vertigineuse envoûte le lecteur par sa puissance romanesque et émotionnelle.
Née au Canada en 1979, Emily St. John Mandel est l'auteur de Dernière nuit à Montréal (2009), On ne joue pas avec la mort (2010) et Les Variations Sébastian (2013), tous trois publiés en Rivages/noir. Succès international traduit dans une vingtaine de langues, finaliste du National Book Award, Station Eleven l'a imposée comme l'une des romancières les plus reconnues d'Amérique du Nord.