Collection(s) : Hommes et sociétés
Paru le 02/01/2005 | Broché 364 pages
Public motivé
préface Jean Copans
En mars 2000, le Sénégal a connu une alternance politique qui a interrompu le règne sans partage exercé par le Parti socialiste (PS) depuis l'indépendance. L'évolution du système clientéliste dans la région du delta du fleuve Sénégal permet de comprendre le déclin du parti au pouvoir.
Ce travail a pour point de départ la libéralisation économique et politique intervenue au début des années quatre-vingt. Dans le nord du pays, le désengagement de l'État s'accompagne de la construction de barrages dédiés à l'aménagement du fleuve. Alors que la promotion d'un modèle d'irrigation privée était réputée substituer des rapports marchands aux liens de dépendance personnels, les relations clientélistes en sont sorties renforcées. Le clientélisme s'est reconstitué sur de nouvelles bases productives, par l'intermédiaire d'entrepreneurs politiques qui captent dans la sphère privée les ressources destinées à mobiliser leurs clientèles.
Ces leaders construisent leur hégémonie en s'appuyant sur les formes «traditionnelles» du pouvoir, notamment à partir d'alliances parentales avec les anciennes notabilités régionales, tout en manipulant les ressources du développement pour le consolider. L'intensification des conflits factionnels autour de la rente du développement a toutefois suscité l'émergence de logiques dissidentes fondées sur la remise en cause des pratiques corruptrices.
La description anthropologique de l'évolution des hiérarchies pendant la période de la libéralisation témoigne de leur érosion progressive. Les dynamiques de la société rurale, révélées à travers la famille, le foncier, la dette, affectent les relations de pouvoir, et les conflits qu'elles engendrent réagissent sur les comportements politiques. Cette recherche décrit, à partir de différents angles, comment les changements de longue durée et les conjonctures politiques qui traversent l'histoire nationale et locale contribuent à l'essor progressif d'un espace public.
Tarik Dahou est docteur en anthropologie sociale et ethnologie et chercheur associé au Centre d'études africaines de l'EHESS. Il mène actuellement des recherches sur les espaces publics en Afrique de l'Ouest. Dans le cadre de ces travaux il a édité un numéro des Cahiers d'études africaines et un numéro de Politique africaine. Il a également édité un ouvrage collectif sur la décentralisation en Afrique de l'Ouest.