Collection(s) : Essais
Paru le 25/10/2018 | Broché 309 pages
Public motivé
Sorbonne
Cet essai porte sur les romans écrits par Georges Simenon au cours des années trente, aussi bien les « romans durs » que les « Maigret », et en renouvelle profondément la lecture. Il y décèle un scénario latent. Hanté par le « vertige de la perte » qui le pousse à un retour fusionnel dans le Monde-Mère sous les espèces du rien, voire de la mort, l'écrivain l'exorcise en se réfugiant dans le contre-monde du Livre, par instinct de conservation, en « avare » de son désir. Mais il en conçoit de la mauvaise conscience, car il s'éprouve alors comme un escroc, ou un faussaire : c'est donner en effet pour réels, dans ses livres, des êtres et un monde de papier, sans vraie consistance. Pour se laver de ce péché d'escroquerie, il place dans ses romans des personnages qui sont ses doubles, assignés à des espaces mettant en abyme le Livre. Ce sont des boucs émissaires, car ils endossent la faute et, d'une façon ou d'une autre - en mourant, dans bien des cas -, l'expient, ce qui permet d'en dédouaner l'écrivain. Cependant, il n'y a là qu'un subterfuge puisque, en réalité, ce sacrifice expiatoire du Livre et de son démiurge se produit... dans un livre. C'est pourquoi, un roman terminé, Simenon n'a d'autre choix que d'en entreprendre un autre.
Laurent Fourcaut est professeur émérite de Sorbonne Université, en littérature française des XXe et XXIe siècles. Ses recherches portent notamment sur les oeuvres de Jean Giono - il dirige la série « Jean Giono » de La Revue des lettres modernes - et de Georges Simenon, ainsi que la poésie moderne et contemporaine : « Alcools » de Guillaume Apollinaire. Je est plein d'autres, remembrement et polyphonie ; Un lyrisme lessivé à mort du réel. L'oeuvre poétique de Dominique Fourcade. Rédacteur en chef de la revue de poésie Place de ta Sorbonne, il est également poète (derniers livres parus : Or le réel est là... et Joyeuses Parques).