Collection(s) : Indigène art
Paru le 24/10/2012 | Broché 125 pages
Tout public
La résistance des signes
Peintres aborigènes d'Australie
La réédition du catalogue de l'exposition éponyme de la Villette, à Paris (26 novembre 1997 au 11 janvier 1998), devenu un « classique » pour les amateurs et les spécialistes de l'art aborigène, était très attendue. Nombre des acteurs de la révolte des signes, qui vit se dresser l'Australie aborigène dans les années 1970, ont aujourd'hui disparu et le monde de l'art, face à l'emballement pour cette peinture, efface volontiers le combat audacieux, douloureux que menèrent les grands initiés d'un bout à l'autre du continent pour donner le coup de grâce au génocide culturel sans pareil auquel on les soumettait depuis deux siècles. Il est ici restitué dans toute sa complexité, à travers des chairs, des formes, des couleurs, des matières, raconté par tous ceux qui ont, d'une manière ou d'une autre, participé à la révélation de ce peuple artiste pour qui créer, c'est résister, et résister, c'est créer.
Sylvie Crossman et Jean-Pierre Barou ont séjourné en 1985 à Papunya, dans le désert central de l'Australie, où émergea en 1971 l'Ecole de Papunya célébrée aujourd'hui internationalement. Ils rencontrent alors ses derniers grands maîtres et notamment Kaapa Tjampitjinpa, le premier à avoir peint sur le mur de l'école de Papunya le Rêve de la Fourmi à miel, acte de naissance de cette terre ocre, mais aussi Turkey Tolson Tjupurrula, Mick Namerari Tjapaltjarri, Clifford Possum Tjapaltjarri... Ils rendent visite à Geoff Bardon, l'artiste blanc, amoureux de Gauguin, qui encouragea les initiés à franchir l'interdit et à peindre sur des supports fixes leurs signes sacrés, éphémères. De ces rencontres, de ces ultimes confidences naîtront deux expositions majeures en France, dont ils seront les commissaires : en 1990, L'Eté australien au musée Fabre de Montpellier, puis en 1997 Peintres aborigènes d'Australie, à l'établissement public du parc et de la grande halle de la Villette, qui vit voyager jusqu'à Paris non seulement Turkey Tolson Tjupurrula, un des derniers survivants du groupe de Papunya, mais des artistes femmes de la célèbre école d'Utopia, plus à l'est du désert, comme Gloria et Ada Petyarre, ainsi que, venus de Turkey Creek aux confins nord-ouest, les héritiers de Rover Thomas, le premier peintre aborigène à avoir représenté l'Australie à la Biennale de Venise, en 1990.
Sylvie Crossman et Jean-Pierre Barou sont les fondateurs d'Indigène et les éditeurs d'Indignez-vous !, le manifeste de Stéphane Hessel dont l'onde de choc a résonné dans le monde entier. Ils ont été les commissaires de L'Eté australien (1990, musée Fabre, Montpellier) et Peintres aborigènes d'Australie (1997-1998, établissement public du parc et de la grande halle de la Villette, Paris) qui ont révélé en France les maîtres aborigènes, et notamment ceux de Papunya. Ils sont aussi auteurs, ensemble, de Enquête sur les savoirs indigènes (Gallimard, Folio actuel, 2005) et, séparément, de Soeurs de peau (Sylvie Crossman, roman, Albin Michel, 2008) et L'Oeil pense, essai sur les arts primitifs contemporains (Jean-Pierre Barou, Petite Bibliothèque Payot, 1996).