Paru le 21/08/2019 | Relié 149 pages
préface de l'auteur | lecture d'Alexandre Battaglia | dessins d'Ena Lindenbaur
Stop. Assez de ce travail et de ces confitures. Assez joué à l'homme. J'ai l'impression d'être pris dans les fils visqueux, dans l'oeuvre étrangleuse de l'araignée. La langue comme glu mortelle. Dire non à l'empire de l'histoire et du style, aux domesticités. Se méfier aussi du poème. Méchant penchant. Pas là pour ça. Justement pour le contraire. Au besoin, recommencer. Partir de zéro. S'il faut un drame, jouons celui des recommencements.
Ouvrage-matrice situé au seuil de l'oeuvre de Cédric Demangeot, à part dans la production de son auteur et jusqu'à présent inédit, Pour personne part d'une défiance à l'endroit du poème pour s'engager, avec une défiance non moins grande, dans la voie de la narration. Anti-poésie, anti-récit : double impasse, passe étroite, d'où doit émerger un possible recommencement.
Et de fait, quelque part entre la première partie, où un narrateur refuse férocement à son récit tout personnage et finit néanmoins par introduire un certain jean personne, et la seconde, journal intime dudit jean personne, dans lequel alternent anecdote, pensée, humeur, maxime, pastiche, portrait, lettre et même poème ; quelque part dans ce coq-à-l'âne tragique et jubilatoire, dans ce ruban de Möbius, dans ce grand huit d'écriture, dans ce chemin de chaussetrappes et vertiges, entre la prose du monde et l'intériorité de la poésie, la parole se retrouve, se libère et dégage, pour elle-même comme pour son lecteur, une nouvelle perspective.
Né en 1974, Cédric de Mangeot est l'auteur d'une importante oeuvre poétique (dernier titre paru : Un enfer, Flammarion, 2017). Il est également traducteur (Leopoldo María Panero, Nicanor Parra, Shakespeare) et responsable des éditions fissile et de la revue moriturus.
Née en 1956, Ena Lindebaur a étudié la calligraphie et la peinture à l'école d'art de Stuttgart ; elle vit aujourd'hui dans la Drôme. Ses dessins sont maladroits comme ceux d'un enfant, tremblés comme ceux d'un épileptique, évidents comme ceux d'un fou. « Une démarche où je ne veux pas décider, mais rester dans la possibilité dessin/peinture, figuration/abstraction. » (www.enalindenbaur.eu)