Cahiers de la justice (Les) - Revue de L'ENM, n° 4 (2019). Vulnérabilités

Fiche technique

Format : Broché
Nb de pages : 172 pages
Poids : 390 g
Dimensions : 19cm X 24cm
Date de parution :
ISBN : 978-2-247-18995-3
EAN : 9782247189953

Vulnérabilités

chez Dalloz

Serie : Cahiers de la justice (Les) - Revue de L'ENM. Vol 4 (2019)

Paru le | Broché 172 pages

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Revue
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Quatrième de couverture

Il est significatif que le mot vulnérabilité ait fait son entrée dans le vocabulaire des sciences sociales pour désigner l'exposition aux menaces sur l'environnement. Non qu'il n'existât pas jusqu'alors. Mais l'ampleur des méfaits écologiques exigeait qu'on les nomme. Et sentir leurs effets sur les populations vulnérables au-delà d'une froide terminologie technique. Pour cela, le roman par sa puissance narrative dévoile la réalité d'un mal qu'on ne veut guère voir en face. C'est toute la valeur de la Malchimie de Gisèle Bienne superbement commentée dans ce numéro des Cahiers de la justice par Colette Camelin. Ce récit lève le silence sur les conséquences fatales de l'usage des pesticides pour la santé des agriculteurs. On y suit dans les moindres détails la fin d'un ouvrier ayant passé sa vie dans les champs à utiliser les produits de l'agrochimie. C'est la force de ce type de récit très charnel de nous faire entrer dans ce que vivent au quotidien ces hommes prématurément vieillis et malades. Eux qui ont cru au progrès de la science et à ses mots (produits « phytosanitaires », « glyphosate »), découvrent dans leur chambre d'hôpital l'autre nom du projet productiviste : leucémie, tumeur cérébrale, cancer du sang, mélanome, blastes, troubles cognitifs, moelle osseuse détruite... Ils se souviennent aussi. Ne leur avait-on pas dit pour lancer la politique agricole des années 60 qu'ils auraient tout à gagner à se lancer dans l'agriculture intensive ? Que reste-t-il de leur vie alors qu'ils attendent la fin dans une chambre d'hôpital ? L'agrochimie n'a cure de la mort des patients.

Ce livre parle de ces hommes taiseux. « Les vieux paysans, écrit Gisèle Bienne, quittaient ce monde courbés, cassés, sans une plainte. On tarde à consulter un médecin quand les bêtes exigent d'être traites matin et soir, qu'il faut semer, planter à temps, quand la moisson ne peut attendre, que le matériel vous lâche ou que vos douleurs au dos ou à la hanche ralentissent votre rythme de travail » (p. 125). Alors ils pourront déposer plainte contre le glyphosate, cette arme chimique, demander réparation, attendre que justice leur soit rendue. Mais comment trouver la preuve convaincante, monter un dossier avec des dates, des noms de produits, des photos... alors qu'on n'a plus de force. C'est le rôle de l'association Phyto-Victimes et du collectif « Justice Pesticides » de prendre le relais et de conduire une bataille de la reconnaissance à l'issue incertaine.

Le roman par sa précision documentaire et l'empathie saisie au ras des cas singuliers donne une tout autre réponse. Il rend un dernier hommage à ces hommes qui doivent prendre en charge la maladie. Il porte témoignage du mal commis sur la vie nue. Témoigner comme on ouvre une fenêtre pour ne pas étouffer, pour dire l'injustice de cette catastrophe silencieuse, pour « résister par l'écriture à l'emprise du malheur » conclut Colette Camelin.