Crier écrire

Crier écrire

Sa vie fut violée par la guerre attisée par la fureur... du Führer. Ce n'était pas le bon moment pour naître en ce pays, à cette époque, quand criaient sous les bombes les ombres des fuyards que la mort faisait taire. Apparemment autiste, l'enfant, dès qu'elle sut former les lettres de l'alphabet, traça sur ses cahiers les refrains de sa chanson triste, comme Villon et tous les poètes qui la firent planer et qu'elle ne cessera de vénérer.

Cette vie en parallèle lui permit de surnager sur les eaux putrides de l'existence. Sans s'arrêter d'écrire, y compris au volant de sa voiture qui la planta dans un platane la nuit du réveillon de Noël ; elle faillit s'arrêter de vivre. Réanimée tel un geyser elle rejaillit pour reconstruire une vie nouvelle, radieuse, créée comme l'oeuvre de son Pygmalion, ce Michel-Ange de la chirurgie qui fit de son visage fracassé un faciès présentable. Comme un miracle elle vit naître deux fils.

Elle délaissa l'exercice de la pharmacie, imposé par sa mère, et devint médecin rééducateur afin, à l'aide d'appareillages, de faire se lever et marcher des handicapés locomoteurs. À la retraite, le slam ralluma la flamme de l'écriture en son âme et envahit de liesse sa vieillesse. Les mots, les mots venus d'ailleurs pour planer au-delà des maux d'ici.

Il a fallu plus de quarante ans, pour qu'un ami la pousse à se faire éditer. Mais, entre temps, des valises et des valises de poèmes ont été brûlées ou moisissent dans une cave...
Ce nouveau livre abrite de précieux rescapés qui témoignent de la vie de May.