Collection(s) : Double
Paru le 03/01/2017 | Broché 138 pages
Et si le meilleur roman américain du moment était... français ?
Seattle, Michigan. Dwayne Koster déteste Alex Dennis. Il le hait comme collègue d'université à Ann Arbor, comme voisin et surtout parce qu'il est l'amant de Susan son ex-femme. Il aura fallu un barbecue entre voisins et un poker menteurs entre profs de fac pour en arriver là. Mais Dwayne n'a pas dit son dernier mot... Oh non.
Ah la belle entreprise pour l'écrivain : écrire un roman américain comme seuls les Américains savent le faire. Mais, après tout, pourquoi pas, c'est à sa portée, il le sent bien et il va même nous expliquer (en voix off s'il vous plait) comment construire un roman de "dimension internationale".
Là où certains pataugent et singent grossièrement l'art romanesque de nos cousins d'outre-atlantique, Tanguy Viel, lui, virevolte dans un état proche de l'Ohio et s'amuse de tous ces clichés auxquels il parvient à donner une nouvelle fraîcheur.
Livre après livre (lisez les tous, surtout "Paris-Brest" !), Tanguy Viel se bonifie, se libère et croque à belle dent dans le gros gâteau de la littérature pour notre plus grand plaisir.
Du jour où j'ai décidé d'écrire un roman américain, il fut très vite clair que beaucoup de choses se passeraient à Detroit, Michigan, au volant d'une vieille Dodge, sur les rives des grands lacs. Il fut clair aussi que le personnage principal s'appellerait Dwayne Koster, qu'il enseignerait à l'université, qu'il aurait cinquante ans, qu'il serait divorcé et que Susan, son ex-femme, aurait pour amant un type qu'il détestait.
Il ne faut pas s'y tromper : malgré les apparences, Tanguy Viel n'a pas écrit un roman américain, mais une fiction typiquement « made in France ». Toute de références, de clins d'oeil et d'ironie. Avec pour décor en trompe-l'oeil les États-Unis, leur littérature et ses poncifs. [...]
De tout cela surgit un véritable petit joyau littéraire. Assurément le livre le plus enlevé de Tanguy Viel, formidable exercice d'écriture et de lecture critique. Se déployant sur deux niveaux à parts égales : la tenue d'une fiction « américaine », à laquelle ne manque aucun des accessoires convenus de l'appareillage narratif ; un travail systématique de distanciation qui en exhibe les tics et les habitudes paresseuses.
La jubilation qui naît de ce roman, le sourire qui ne nous quitte jamais tient entre autres à ce qu'on se laisse mener par un narrateur qui joue avec le conditionnel, le futur ou le passé [...]. Des ellipses feront deviner. Ou bien des fins de chapitre qui ménagent le suspense, comme il convient dans toute fiction américaine, qu'elle soit écrite ou filmée. L'art de Tanguy Viel repose sur sa passion du cinéma. [...] Cinématographique jusque dans le développement de la phrase. Elle tourne, elle ressasse, elle emprunte à l'oral, elle joue du retardement, laissant exploser le mot final, celui qu'on attendait avec l'impatience de l'enfant qui écoute un conteur, à la fois inquiet et joyeux.
Tanguy Viel est né à Brest en 1973. La Disparition de Jim Sullivan, son sixième roman, est paru en 2013.