Collection(s) : Médecine & sciences humaines
Paru le 31/01/2013 | Broché 309 pages
Tout public
préface par Jean-Marie Delarue
« On va les soigner en prison ! ». Qui n'a entendu cette phrase à l'occasion d'un fait divers tragique ? Comme si la mission de la prison (punir et réinsérer) intégrait désormais un nouvel objectif : soigner. Or, la prison, à la différence de l'hôpital, n'est pas un lieu de soin même si c'est un lieu où l'on soigne.
Le face à face du médecin et du patient incarcéré est une situation exemplaire pour toucher du doigt l'ambivalence de la prison, déchirée entre ses deux finalités, répressive et préventive, mais aussi l'ambivalence de la médecine, prise à la fois dans la nécessité d'objectiver le corps malade et de s'adresser à une personne.
Cette réflexion sur la médecine carcérale décrit de manière concrète les difficultés que vivent dans leur chair les personnes incarcérées. Elle défend l'idée que le médecin exerçant en prison est en danger quand, comme ses prédécesseurs du XIXe siècle, il se satisfait d'une approche scientiste, technique, cesse de s'occuper de son patient singulier, s'associe à l'institution pénitentiaire afin d'établir le « profil » des personnes captives, décider de leur vulnérabilité, ou de leur dangerosité, et enferme les personnes dans leur « comportement » au lieu de les aider à retrouver du jeu, de la liberté, de la vie.
Dans son exercice en milieu pénitentiaire, le médecin peut résister en faisant ce qu'il sait faire, c'est-à-dire de la médecine, en luttant contre les dispositifs illusoires qui visent à la transparence, a l'évaluation et à la prévision, et en gardant l'exigence éthique au centre de son métier.
Anne Lécu exerce la médecine dans une maison d'arrêt d'Ile- de-France depuis 1997 et est aussi docteur en philosophie. Elle a publié Des larmes (2012) et Où es-tu quand j'ai mal ? (avec Bertrand Lebouché, 2005).