Paru le 23/02/2017 | Broché 207 pages
préface de Jean-Luc Moreau
« [Le romancier] réunit un tribunal et y appela ses personnages comme témoins. Il devinait que ces ombres d'encre et de papier avaient beaucoup à lui révéler. C'étaient eux, après tout, qui s'étaient promenés dans les récits, y avaient discuté, pensé, souvent aimé, et qui surtout avaient obligé l'auteur à les faire naître tel ou tel, à évoluer dans des situations qu'à son insu ils s'étaient choisies. Le premier qui se présenta fut le Singe, bondissant, faisant mille grimaces et tirant les cheveux de Rastapan, le président de séance, qui eut beau frapper la chaire de son maillet. L'animal était irréductible. Enfin, lorsqu'il le voulut bien, il arrêta sa sarabande, s'assit de guingois au sommet de la bibliothèque [...]. Un long et noir personnage qui se tenait dans un coin prit la parole:"[...] Si l'écriture n'est qu'une suite de signes conventionnels, c'est-à-dire un corps, celui qui en épouse l'expression y ajoute un esprit, parfois une âme. Notre auteur ne manque ni d'imagination, ni de sentiment. Néanmoins, il ne nous a contraints en aucune façon". »
Tel est FrédérickTrlstan, prix Goncourt 1983 (Les Égarés), maître hors pair d'une oeuvre magique. Loin de goûter à la sérénité bien méritée, une fois sa mission accomplie, le voilà soudain traduit en justice par ses propres personnages. Le romancier sera-t-il déclaré coupable d'avoir éveillé en nous la tentation d'une vie et d'un univers qui nous seraient autrement à jamais demeurés inaccessibles ? Tour à tour poète, jongleur puis alchimiste, Frédérick Tristan nous entraîne dans la spirale d'un récit autobiographique placé sous la tension de l'éternelle réinvention. Chez lui, le mystère de la vie se change en merveilleux, l'amnésie en corps de fée.