Serie : Matière à dispute. Vol 2
Paru le 20/03/2011 | Relié 131 pages
Tout public
illustrés par Palix | préface de Jacques A. Bertrand | postface de Michel Francard
Matière à dispute
Tome 2
Réfléchir sur les mots qui conduisent notre vie permet de mieux sentir le monde et notre destin.
Alain Duchesne et Thierry Leguay
« La meilleure façon de marcher, dit une chanson de marche, c'est encore la nôtre, c'est de mettre un pied devant l'autre et de recommencer. » Il en va de même pour la meilleure façon de parler : chacun croit volontiers que c'est la sienne, la meilleure. Et qu'il suffit, comme pour marcher, de mettre en confiance un mot devant un autre, puis un autre, puis encore un autre, et... et c'est tout bon, au bout du compte. Ça fait la rue Michel*. Oui, c'est un peu court, quand même. Et comparaison n'est pas raison. Car la marche à pied ne sert qu'à marcher - et certes c'est déjà beaucoup, « Excellent même, disait Vialatte, trois heures tous les matins dispensent de tout régime. » - mais la parole, elle, sert à l'échange, à la dispute, à l'entente. Elle sert à faire société. (Une phrase est, en résumé, une société ; un modèle de société ; société faite de mots ; avec ses règles, sa syntaxe.) Seulement, avant d'arriver à s'entendre, à tomber d'accord sur quelque chose, il faut d'abord se comprendre. Il faut savoir ce que parler veut dire.
La langue est notre monnaie commune ; la monnaie de tous nos échanges. Une monnaie vivante, fluctuante. Qui a sa valeur. Or elle change tout le temps, cette valeur. Un mot par-ci, un autre par-là. C'est bien, c'est sain, c'est le propre de tout organisme vivant, mais il ne faut pas non plus qu'elle change trop vite, ni trop fort. Sinon on perd ses repères, on perd pied. Sinon c'est la crise, le fiasco, la débâcle, le krach, la banqueroute.
La langue, il faut toujours en parler, toujours y revenir ! Toujours y réfléchir. Il faut veiller sur elle, veiller à sa tenue et surveiller sa marche, son cours, ses écarts, ses flambées.
« Veiller sur la langue, c'est veiller sur la cité », dit Paul Valéry.