Collection(s) : Les dossiers H
Paru le 14/10/2005 | Broché 339 pages
Tout public
traduit du russe par Catherine Géry et Céline Bricaire | traduit de l'anglais par Catherine Géry et Céline Bricaire | coord. des critiques en Russie Irina Stoliarova et Natalia Ozerova | textes russes contemporains réunis par Irina Stoliarova
La réception critique de Nikolaï Leskov a toujours été problématique, qu'on réduise celui qui fut l'un des écrivains russes les plus originaux de la seconde moitié du XIXe siècle à un fin connaisseur de la vie nationale dans ses variantes géographiques, historiques, sociales et surtout linguistiques, ou qu'on ne voit en lui qu'un auteur scandaleux, que ses démêlés avec l'intelligentsia de gauche de son époque avaient rendu tristement célèbre.
Nous avons choisi d'évoquer ici un autre aspect de l'oeuvre de Leskov, que la critique formaliste a été la première à mettre en avant de façon positive : l'oeuvre du conteur, du porteur de récit, du colporteur d'histoires en marge de l'Histoire officielle, qui réinvestit la littérature dans sa fonction première, celle de raconter ; l'oeuvre du bonimenteur à la verve intarissable qui, selon les paroles de Tolstoï, connaissait la langue « jusqu'au tour de passe-passe » ; l'oeuvre de « l'antiquaire » et de « l'isographe » qui a puisé dans l'art de l'icône ou du loubok les savantes arabesques de ses récits et leurs mosaïques verbales. Une oeuvre, enfin, où archaïsme et modernité se conjoignent pour annoncer de façon magistrale la prose du XXe siècle. Remizov, Babel, Zochtchenko ou Pilniak ne doivent pas à Leskov leur seul goût de l'ornementation et un certain primitivisme ; leurs expérimentations poétiques et narratives, leurs tentatives de renouveler les genres comme la langue de la littérature en font aussi les dignes héritiers de l'auteur du Conte du Gaucher bigle de Toula et de la puce d'acier et du Clergé de la collégiale.