Pharmacosmos

Héritières de longue date des travaux de Léonard de Vinci puis des encyclopédistes, les expressions artistiques nées au XIX^e siècle avec la révolution technique de l'industrie sont très nombreuses. Elle-même «art industriel», la photographie participe de ce mouvement. Depuis le milieu du XIX^e siècle, les photographes fascinés par les beautés de l'industrie se sont succédé.

Après la Grande Guerre, des courants artistiques nouveaux apparaissent partout en Europe. Dadaïsme, surréalisme, futurisme, constructivisme, utilisent la photographie dans un mélange de dérision et d'objectivisme.

C'est à la rencontre de ces univers mêlés que je suis allé en photographiant les centres de recherche en pharmacologie et en cosmétique et les unités de production du Val-de-Reuil. Ici, la maîtrise des opérations est totale, le savoir-faire le plus perfectionné s'exerce au quotidien dans un univers clos, parfaitement contrôlé.

L'univers industriel s'est aseptisé. Des hommes en blanc actionnent des réacteurs pouvant malaxer dix tonnes de produit, à partir d'un petit clavier d'ordinateur. L'usine d'autrefois, mécanique, huileuse, luisante, bruyante et noire est devenue informatique, silencieuse, blanche et chromée. Aujourd'hui, des femmes et hommes, moins nombreux, s'activent dans les laboratoires. Le «maître de forges» a troqué son tablier de fer contre une blouse blanche.

Le lien entre l'Homme et la Machine a ainsi évolué. Ces étranges robots sont devenus presque autonomes... Ces images témoignent de mon rêve éveillé dans cet univers particulier. Visiteur privilégié, je livre aujourd'hui ces photographies toutes empreintes de la fascination pour ces machines que je portraiture tels des individus vêtus de chromes.

Jean-Christophe Ballot