Pionniers à Ingolstadt

Quatrième de couverture

Affirmer que le théâtre de Marieluise Fleisser est épique, c'est le démarquer en tout cas de la description naturaliste du milieu ou de la peinture de genre à coloris local. C'est relever aussi son allergie aux formalismes de toute espèce. C'est mettre l'accent sur les brèches de l'écriture par lesquelles ce théâtre s'ouvre aux réalités de la société, des rapports interhumains, sans rester prisonnier des canons et des conventions du réalisme social. [...] Dans ces brisures à peine calculées, qui rompent le substantialisme propre à la psychologie comme à la sociologie traditionnelles, Brecht avait reconnu très tôt l'amorce d'une nouvelle technique, à vrai dire peu codifiable. C'est pour en permettre le déploiement qu'il préconisa de bannir toute véritable action de Pionniers à Ingolstadt, sans craindre d'associer la modernité ainsi recherchée à la pratique aléatoire du bricolage : «Il faut que ce soit bricolé comme certaines autos qu'on voit circuler à Paris, des autos fabriquées artisanalement de morceaux que le bricoleur a pu réunir par hasard, mais tiens voilà que ça roule, voilà que ça roule !». Marieluise Fleisser, qui rapporte ces propos, ajoute qu'à l'époque elle était encore bien jeune, qu'elle en savait aussi peu sur les automobiles que sur les militaires, et de toute façon n'avait pas comme Brecht la tête politique : finalement, elle avait tout simplement écrit une pièce sur les soldats et les filles. Aujourd'hui les commentateurs inscrivent cette pièce à la suite des Soldats de Lenz et du Wozzeck de Büchner, tant pour sa construction que pour sa thématique.

P. I.

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