Paru le 05/02/1990 | Broché 152 pages
traduit du serbo-croate par Harita et Francis Wybrands
Mon idée à moi, c'est que je préfère être accroché au cou de l'histoire, plutôt que ce soit elle qui soit accrochée au mien.
Ca c'est mon idée. Mais il faut bien dire que les choses ne se passent pas du tout comme on le voudrait. Comment leur expliquer ?
Ils s'accrochent tous à cette question : il était bon, hein ? Pourquoi alors l'as-tu tué ? Moi je vous le dis ; Messieurs et Messieurs les camarades, qu'il y avait quelque chose d'autre entre nous. Mais je ne vais pas vous le dire. Vous n'avez qu'à me juger. C'est un problème qui me concernait :
Lui n'avait rien à voir avec ça.
Toujours est-il que me voilà assis dans ma cellule en train de rédiger ma déposition. Il va falloir que je m'explique. Un gardien de plage qui secourt un officier allemand est un traître. C'est une chose que je peux comprendre.
Mais que doit-il faire, ce même gardien, de piscine, lorsqu'il est Gastarbeiter en Allemagne et que le colonel n'est plus un colonel, mais un industriel et son patron ?
Je ne sais plus. Je crois que Socrate, lui, aurait su. Mais il ne faut pas que j'embrouille tout. Il y a, au moins, une chose qui est claire : je ne collabore plus. Avec personne. J'ai été une fois collaborateur et, tenez, voilà le résultat !
Borislav Pekitch est né en 1931. Il a publié une dizaine de romans. Ses pièces de théâtre et ses pièces radiophoniques ont été jouées un peu partout dans le monde. Son roman La Toison d'or est peut-être l'œuvre littéraire la plus ample jamais réalisée. Plusieurs milliers de pages retracent l'histoire des Balkans, de l'empire byzantin à nos jours. Ses romans spéculatifs et utopiques, ses souvenirs de la prison, ces récits à mi-chemin entre l'allégorie politique elle conte moral sont remplis d'observations ironiques et provoquantes.
