Paru le 12/12/2023 | Broché 139 pages
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« Ce n'est pas d'aujourd'hui que je le découvre, je le sais depuis longtemps - ce rapport à la mort, et en particulier à la mort du père, est à l'origine de toute l'histoire. C'est le fantôme du père qui vivifie paradoxalement l'expérience de vie. C'est le fantôme qui vivifie. »
« Je me sentais juif, je me sens toujours juif, mais c'est un judaïsme, si j'ose dire, filial, un judaïsme en quelque sorte non pas imaginaire mais qui reposait sur la tripe plus que sur une pensée. J'étais juif parce que mes ancêtres étaient juifs. »
« J'ai eu les pires patients, j'ai eu les assassins, j'ai eu tout ce qu'on veut. J'ai toujours été en quête d'une part claire, d'une part ensoleillée d'eux-mêmes, dans les ténèbres les plus profondes. C'est une marque chez moi importante, dont mes patients ont pu bénéficier, parce qu'une telle force, cette conviction délirante finalement, par certains côtés, mégalomaniaque toujours, que dans le plus désespéré quelque chose d'autre puisse advenir, la surprise, que le même puisse s'entendre différemment, c'est le bonheur. »
Dans la première grande phase de sa carrière, Michel Guenkine s'associait aux psychiatres français de la Libération, qui ont largement ouvert le champ de la discipline, avant l'introduction des psychotropes. À 90 ans, il est toujours un praticien respecté, enseignant et superviseur de cas depuis plus de trente ans dans le cadre de la Société psychanalytique de Genève. Dans cet ouvrage d'entretiens avec Clive Thomson, il illustre à travers sa propre histoire familiale et personnelle ce qui constitue le coeur de l'originalité de son approche, à savoir que l'on porte les joies et les traumatismes des générations précédentes et que l'on transmet les siennes aux suivantes. Le souvenir de la Russie des pogroms, la perte du père engagé dans les Brigades internationales, le traumatisme de l'angoisse de la Shoah sont autant de fardeaux qu'il porte mais aussi des éléments dans lesquels il puise force et espérance. L'espérance est sans doute le mot-clef de ce récit, la foi dans une psychanalyse bienveillante qui permet de supporter l'insupportable. À travers ses propres cas mais aussi dans le dialogue avec des psychanalystes de renom et dans l'analyse des différentes sociétés de psychanalyse, le docteur Guenkine propose un cadre éthique, préoccupation majeure de sa démarche. Il défend l'originalité de son approche non orthodoxe en analyse et aborde aussi avec simplicité certains échecs. Une réflexion riche tant sur le rapport entre médecine, psychiatrie, sexualité et toxicologie que sur la spécificité du judaïsme laïc dans une société d'essence catholique.
