Collection(s) : Essais, écrits sur l'art
Paru le 17/09/2014 | Broché 233 pages
Public motivé
préface de Roland Recht
Dans le contexte de l'évangélisation populaire à la fin du Moyen Âge, la fortune artistique du franciscain saint Bernardin de Sienne ((...) 1444) s'est révélée exceptionnelle. Elle croise des questions liées aux fonctions sociales et religieuses de l'art dans les années 1420-1430 qui voient l'éclosion d'une peinture moderne en Italie. Le saint prédicateur, célèbre pour sa tablette conçue pour l'adoration du Nom de Jésus, bien qu'il ait été inquiété à plusieurs reprises par les autorités religieuses, a fait l'objet d'innombrables représentations dès sa mort et bien avant sa canonisation.
Dressant l'iconographie de la glorification du saint, Daniel Arasse souligne qu'il s'agit du premier saint dont l'image peinte ressemble sans conteste au personnage réel ainsi que l'atteste le masque mortuaire conservé à l'Aquila. Ce trait de « « ressemblance », ou de « vérité dans l'imitation », contemporain du développement du portrait à la Renaissance, donnera lieu à divers modèles originels qui, chacun, sera producteur de figures en séries aux innombrables variantes. À la question de la ressemblance soulevée par le portrait s'ajoute celle, tout aussi cruciale ici, de la ressemblance des représentations entre elles.
Loin de l'iconographie traditionnelle des saints fondée sur les attributs, la figure de saint Bernardin est ainsi décrite comme le lieu d'un « extraordinaire travail figuratif » et idéologique, constitutif de la mise au point du type du saint ascétique et spirituel dont les signes particuliers permettent de restituer ainsi le « portrait-robot ». Par quoi l'analyse sérielle de l'auteur, confrontée en permanence à l'exégèse des textes anciens et à la pratique picturale du temps, rejoint la question des « expressions saintes » et une interrogation méthodologique sur les moyens d'inventorier ces modalités liées aux « mouvements de l'âme ».
Daniel Arasse est l'auteur d'ouvrages d'histoire de l'art qui ont fait date tels que L'Homme en perspective. Les Primitifs d'Italie (1978,2008) ; L'Homme en jeu. Les génies de la Renaissance (1980,2009), Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture (1992) ; Le Sujet dans le tableau. Essai d'iconographie analytique (1997) ; Léonard de Vinci. Le rythme du monde (1997) ; L'Annonciation Italienne. Une histoire de perspective (1999) ; On n'y voit rien. Descriptions (2000). Ses travaux ont fait l'objet d'importants recueils posthumes parmi lesquels Histoires de peintures (2004), Anachroniques (2006) et Décors Italiens de la Renaissance (2009).