Marie Ndiaye, Jean-Yves Cendrey et Willy Von Beruf

jeudi
03
novembre
19h30

Rencontres et Débats

Lieu : Millepages 91, RUE DE FONTENAY 94300 VINCENNES

Nous sommes très heureux de vous inviter à rencontrer un couple d'écrivains : Marie Ndiaye qui signe "La cheffe, roman d'une cuisinière" aux éditions Gallimard et Jean-Yves Cendrey, traducteur de "La France comme ma poche" de l'Allemand Willy von Beruf aux éditions de l'Arbre Vengeur.

 

La Cheffe, roman d'une cuisinère

Le narrateur, cuisinier, raconte la vie et la carrière de la Cheffe, une cuisinière installée à Bordeaux qui a connu une période de gloire, et dont il a longtemps été l’assistant – et l’amoureux sans retour.

Née dans une famille d’ouvriers agricoles, cette adolescente ascétique et déterminée devient employée de maison très jeune. Elle va découvrir l’art culinaire en préparant les repas pour ses premiers employeurs. Dès le premier dîner, elle met en œuvre ce qui sera la base de sa gastronomie future : sécheresse, sévérité, simplicité.

Quelque temps plus tard, elle ouvre un restaurant, La Bonne Heure, où le tout-Bordeaux se presse. Dès son embauche, le narrateur se dévoue corps et âme à sa patronne. Il deviendra au fil des années son confident et ami, mais jamais son amant. La vie de la Cheffe, entièrement vouée à l’invention culinaire, semble parfaitement réglée. Son malheur vient de sa fille unique, un concentré d’aigreur, de rancune et de frivolité.

Les phrases de Marie NDiaye se déploient lentement, comme pour envelopper le lecteur avec un charme constricteur. Les replis de l’âme de chaque personnage sont explorés sans hâte, et c’est sans doute ce qui fascine le plus : cette détermination calme dans la volonté de dissoudre la pénombre des êtres, auscultés sans malveillance et sans pitié. Il se dégage du récit une humanité violente, claire, à la fois mélancolique et enviable. La cuisine, qui est au centre du récit, est vécue comme une aventure spirituelle, presque un état de la sainteté. Non que le plaisir et le corps en soient absents, au contraire : mais ils sont les instruments d’un voyage vers un au-delà – la Cheffe allant toujours plus loin dans sa quête d’épure. L’émotion grandit au fur et à mesure de la lecture, jusqu’à la dernière ligne.

 

Marie NDiaye est née en 1967 à Pithiviers. Elle est l’auteur d’une vingtaine de livres, romans, nouvelles et théâtre. Elle a obtenu le prix Femina en 2001 et le prix Goncourt en 2009. Ses pièces sont entrées au répertoire de la Comédie-Française.

 

La France comme ma poche

Livre gigogne, comme une sorte d’écho lointain des Lettres Persanes, cette manière d’anti-guide de voyage, nous fait traverser notre belle France de l’intérieur en secouant ses oripeaux littéraires, politiques, commerciaux, voire sociaux, et les coups pleuvent dru sur cette grande terre de la pleurniche qui jouit de son auto-mortification permanente face à un monde qui s’en fiche un peu voire carrément… Willy, le narrateur, a quitté le pays de son père il y a des dizaines d’années pour rejoindre celui de sa mère, l’Allemagne. Quand le vieillard cacochyme le convoque, énigmatique, dans sa Gironde natale et fatale, il consent à
accomplir la descente vers les origines comme s’il y chutait. Ce qu’il découvre de ce territoire trop aménagé qui s’agite dans des soubresauts inquiétants va lui permettre de renouer avec la figure paternelle et l’amère patrie dont il trace un portrait dévasté. 


Supercherie revendiquée en même temps qu’autobiographie romancée, ce livre d’amour déçu n’épargne personne et surtout pas son auteur et son
traducteur qui traduisent ainsi, gourdin dans une main, stylet dans l’autre, leur malaise persistant, mais semblent entrevoir une issue grâce aux pouvoirs de l’ironie, à la pratique de la satire, aux joies de la paresse, sans oublier les ressources de la frugalité et de la sobriété… Chef-d’oeuvre de mauvaise foi, d’emportement virtuose et d’humour ravageur, La France comme ma poche, travaillé à l’acide, transforme en littérature de haute tenue les convulsions d’un pays subclaquant. Et permet à ce duo de faire entendre trois voix : le père, le fils et l’esprit du traducteur.