Collection(s) : Au coeur du monde
Paru le 05/03/2009 | Broché 936 pages
traduit du polonais par Franck-L. Schoell
Dans des convulsions sourdes disparaissait, à l'orée du XXe siècle, la plus ancienne des civilisations : la civilisation paysanne de l'Europe.
Une civilisation qui émergeait de la nuit de l'Histoire. La base des nations, la garante des traditions orales, la gardienne des mythologies et des religions populaires. Une civilisation du temps où l'Histoire n'existait pas encore et le déroulement de la vie n'était que celui des saisons.
Les romanciers du XIXe siècle ont tenté de nous restituer ce monde. De décrire les moeurs, les coutumes et l'existence des paysans. Mais la plupart d'entre eux n'ont su mettre en relief que certains traits caricaturaux : vengeance, esprit de lucre et de cupidité, superstitions ridicules. Ou lorsqu'il entrait en contact avec le monde urbain : imitations serviles, influences malignes, dégrossissements dégradants.
Voici enfin un livre qui rompt avec le genre en même temps qu'il l'illustre pleinement. Un livre absolument unique. On y retrouve la terre dans toute sa plénitude, son rythme lent et puissant, ses riches heures, mais aussi ses jours tragiques. L'exaltation et la quotidienneté. Les jours les plus longs et les fêtes les plus fastueuses. Un livre en forme de communion intime et de célébration charnelle, à la ponctuation journalière, aux pulsations saisonnières des travaux. Le champ, le moulin, la grange. L'aube estivale et la soirée d'hiver.
Une manière d'épopée brute et raffinée à la fois : ce monde encore au diapason de sa toute-puissance était en train d'annoncer son déclin quand, en 1904, Ladislas Reymont le chantait et l'exaltait. Peut-être est-ce à cela qu'est due cette profonde nostalgie qu'engendre ce grand livre tragique et sombre, plein de foi et d'amour pourtant. On y découvre l'une des vastes épopées de la mémoire humaine, à travers des épisodes qui, partout ailleurs, pourraient paraître excessifs. C'est qu'en transparence de tous ces lieux, de tous ces personnages et de leurs intrigues, surgit cette vérité universelle de l'homme façonné par la terre qui le rend à jamais reconnaissable et inimitable. Un roman magistral et inoubliable.
Ladislas Reymont (1868-1925) était le dixième et dernier enfant d'une famille de paysans pauvres. Après quelques études vite interrompues, il s'engagea dans une troupe de théâtre ambulante, ce qui lui valut de parcourir la Pologne de part en part. Tour à tour employé dans une boulangerie, dans divers commerces et dans les chemins de fer polonais nouvellement créés, il ne cesse d'écrire parallèlement des récits et des nouvelles qu'il fait publier dans différentes revues : La Comédienne, Le Pèlerinage à Czestochowa, Le Vampire, La Terre promise. La publication des Paysans devait lui valoir une célébrité universelle en même temps qu'une consécration de grand écrivain national polonais. L'attribution en 1924 du Prix Nobel devait confirmer cet état de fait déjà connu.
Franck Schoell, grand ami traditionnel de la Pologne, avait publié en 1925 cette traduction admirable reprise ici, sans doute aucun l'un des fleurons de la restitution française d'un chef-d'oeuvre polonais.
