Paru le 11/01/2007 | Broché 522 pages
préface par Bruno Doucey
Brindha Seethanen (Millepages)
60 années de poésie réunies dans un seul volume, 60 années pour quelques heures de promenade à travers toute l’œuvre de René Depestre. Non, plus qu’une promenade, un véritable voyage dans nombre de ses écrits. Les titres parlent d’eux-mêmes : Gerbe de sang , Minerai noir ou plus près de nous , Non-assistance à poètes en danger .
Rage de vivre , encore un titre veiné de sens, plus de 500 pages pour une majestueuse traversée à travers les certitudes d’étudiant rebelle de Depestre, à travers sa fascination pour le marxisme-léninisme et à travers sa quête d’un monde voluptueux. Autant d’axes qui guident ses pas entre Haïti, Paris et Cuba. Depestre jeune, révolté contre un pouvoir en place qui use de répression policière pour faire taire ses contestataires, Depestre mature, dans les empreintes des surréalistes comme dans celles des intellectuels de Présence Africaine, expulsé pour avoir élevé sa voix au-dessus du brouhaha colonialiste français. Depestre engagé, refusant de collaborer à la « papadocratie sommaire » d’un Duvalier, trouvant refuge dans le giron idéologique du Che. Depestre sage, oeuvrant à cette solidarité raciale qui dépasse les frontières face aux répressions qui ont jalonné l’histoire moderne. Un Depestre fidèle à son éternel de poète engagé qui vante encore ce « métier à métisser », il parle ainsi de poésie, alternative utopique offerte à ce « cabri sans cornes » qu’est l’homme dans un monde qui reste « à de nombreux égards littéralement terrifiant ».
Rage de vivre
Me voici
Animal marin de la poésie
Je sens gronder en moi la colère des foules
Je sens vibrer en moi leur rage de vivre
Tels sont les vers par lesquels débutait, en 1945, le premier recueil d'un jeune poète haïtien de langue française : René Depestre. Soixante ans plus tard, en 2005, les Éditions Seghers publiaient une « cérémonie des adieux » du même écrivain sous le titre Non-assistance à poètes en danger. Entre-temps, une vie à couper le souffle, des voyages sur tous les continents et le fleuve indomptable de la poésie.
Le présent ouvrage rassemble la totalité des poèmes écrits par René Depestre au cours de sa vie. Les recueils publiés par Pierre Seghers - Végétations de clartés, Traduit du grand large, Journal d'un animal marin - y côtoient des éditions rares, parues à l'étranger et aujourd'hui introuvables. De Port-au-Prince à Paris, de Prague au Chili, de la Havane au Sud de la France, où il est aujourd'hui installé, le poète donne à lire le chant fantaisiste, dionysiaque et vigoureux de ses passions caribéennes.
René Depestre est né à Jacmel, en Haïti, le 29 août 1926. À dix-neuf ans, il publie son premier recueil, Étincelles, qui connaît un succès immédiat et le contraint à l'exil. Il séjourne dans plusieurs pays européens, au Chili, en Argentine, au Brésil, puis à Cuba, à l'invitation de Che Guevara, où il s'investit dans la gestion du pays. De retour à Paris dans les années 1970, il travaille au secrétariat de l'Unesco, publie plusieurs romans, dont Hadriana dans tous les rêves qui obtient le prix Renaudot. L'ensemble de son oeuvre poétique a été salué par le prix Guillevic en 2006.