Collection(s) : Langue et parole
Paru le 19/01/2010 | Broché 246 pages
Public motivé
avec la collaboration de Simone Bonnafous, Jean-Paul Honoré, Pierre Muller | préface Eléonore Yasri-Labrique
Des noms et des gens en république (1879-1914)
Il ne suffit pas de regarder les mots à travers la vitre ; il faut ouvrir leur fenêtre. Suivons le conseil d'Alain Rey : c'est toute une société éclatée en forces, en groupes, objets de luttes et de pactes, et en autant de stratégies de pouvoirs (à conquérir, à garder, à combattre, à partager ?) que le curieux découvre au-delà des « labels » du discours.
Comment, au début de la 3e République, se nomme-t-on et désigne-t-on les autres, proches ou adversaires ? Et cela non seulement au niveau de la haute parlure, qu'elle soit officielle ou polémique, mais aussi et surtout au niveau de l'expression populaire, sur le plan des définitions comme des mythes. Par les fentes du discours révélées dans l'affrontement social, on observe au mieux la langue en action.
Derrière la façade d'un système dominant (où la grève est un mal, l'anarchiste un criminel, le peinard un fainéant), l'envers des concurrences, des antagonismes et des sens diffractés ou glissants. Et pourtant une forte intercompréhension existe bel et bien, qui fait la résistance du tissu social, car à travers les fractures se dégagent les structures. C'est sur ce vocabulaire de détestations, de consensus, de flou que s'est reconstruite la République.
Maurice Tournier, spécialiste de lexicologie politique et d'« étymologie sociale », a créé en 1967, sous l'impulsion du grand linguiste Robert-Léon Wagner, le « Laboratoire de lexicométrie et textes politiques » de l'ENS de Saint-Cloud et de l'INALF (CNRS), qu'il a animé pendant une trentaine d'années. En 1980, il a fondé avec Louis Bodin la revue Mots, les langages du politique (directeur actuel Paul Bacot, diffusion ENS éditions, Lyon).