Collection(s) : Hommes et sociétés
Paru le 02/06/2005 | Broché 379 pages
Public motivé
préface Ousmane Kane
Le Sénégal connaît depuis une quinzaine d'années une transformation considérable des pratiques de l'islam, notamment chez les jeunes urbains. Le système confrérique se modifie en profondeur et une nouvelle mouvance islamique apparaît, composée de mouvements «néo confrériques». Ceux-ci restent affiliés à leurs confréries d'origines par leur mode de fonctionnement et de légitimité, mais ils se politisent et s'inspirent de mouvements réformistes et néofondamentalistes arabo-musulmans sur des questions tels que l'analyse de l'histoire, le rapport à l'Occident, la laïcité, la conception d'un islam total, etc. Si leur principal objectif est dorénavant de réislamiser par le bas la société, ils refaçonnent toutefois ces apports extérieurs, les adaptent au contexte sénégalais et offrent ainsi de nouveaux types d'identités religieuses.
Le Dahiratoul Moustarchidina Wal Moustarchidaty, issu de la Tidjaniyya, est un parfait exemple de cette nouvelle mouvance islamique au Sénégal. Mouvement urbain, moderne, tourné exclusivement vers un public de jeunes, il espère par un enseignement de masse et une participation au champ politique transformer la société, non conforme, selon lui, à l'islam. A partir d'une longue enquête ethnologique, Fabienne Samson analyse les multiples facteurs de la politisation de ce mouvement strictement religieux à la naissance. Devenu un espace islamisé où tous les actes de la vie quotidienne sont redéfinis, les adeptes y vivent une renaissance identitaire. Ils se transforment alors en ambassadeurs d'une future société islamique idéale. Par des activités citoyennes qui consistent à agir pour la transformation progressive de la société, ils deviennent également des patriotes musulmans comme aime les nommer leur guide Moustapha Sy. Néanmoins, beaucoup de fidèles, inscrits dans un processus d'individualisation sociale et politique, ne deviennent pas de véritables militants de la cause politique de leur leader religieux, ce qui oblige à repenser le rôle réel de ce type de mouvement dans la société sénégalaise et dans le champ politique.
Fabienne Samson est anthropologue, docteur de l'IHESS de Paris. Elle est chercheur à l'IRD et étudie les nouveaux mouvements religieux de jeunes urbains. Elle a essentiellement réalisé des travaux sur l'islam au Sénégal et a plus particulièrement travaillé sur la Tidjaniyya. Toutefois, ses recherches inscrites dans une perspective comparatiste l'ont menée à s'intéresser au mouridisme ainsi qu'à d'autres mouvements religieux néo-chrétiens d'Afrique de l'Ouest. Elle analyse ainsi la manière dont ces mouvements, inscrits dans la globalisation, offrent localement à leurs jeunes fidèles de nouveaux types de socialisations religieuses, et des identités citoyennes et politiques.